Chroniques Nîmoises

Billet du Jour #18

Par Sarah

Sarah nous raconte son confinement. Brin d’humour, réalité sans tabous, tracas et joies du quotidien rythment ses billets.

Écrit le jeudi 2 avril 2020.

Les oiseaux chantent, les chiens aboient.
Ce matin j’ai la tête de Rocky Balboa.
Un tracteur avec un conteneur d’eau et deux hommes désinfectent les rues.
Leurs seules protections sont des gants bleus.
Je les salue et les remercie du balcon.
Je regarde la liste des exercices du jour.
J’envoie un message à la maîtresse pour lui dire la vérité.
« Bonjour Maîtresse,
Je vous écris pour vous dire que je n’ai pas les moyens d’imprimer les fiches. Nous avons un seul ordinateur… Et c’est mon ado qui travaille dessus…
Mon téléphone est en fin de vie.
Je fais au mieux avec 3 enfants de 4, 8 et 14 ans… Toutes hypersensibles, et toutes angoissées par la situation.
Marlée n’a pas appris la poésie. Elle n’a pas lu le livre non plus. On ne l’a pas.
Pour la monnaie, on s’entraîne avec de la vraie monnaie.
On a dessiné notre propre poisson d’avril
Vous lui manquez beaucoup. L’école, ses camarades aussi. Elle en pleure souvent.
Merci pour tout ce que vous faites. « 
Ça soulage un peu ma culpabilité, d’avouer que je n’arrive pas à tout gérer…
*
Je dois sortir faire des courses. Ma voiture ne démarre pas. J’y vais à pied.
Je reviens, chargée de deux sacs remplis.
J’ai fait le plein de nourriture pour la semaine .
Mais aussi de quoi laisser parler la créativité des enfants.
Elles sautent de joies en découvrant la peinture, des feuilles, des pinceaux et des coloriages. Elles me disent toutes les couleurs en Anglais.
J’avoue, pour moi, j’ai pris une bouteille de rosé. Elle s’appelle Gaïa. Ça veut dire Terre.
C’est aussi une déesse, capable de créer la beauté harmonieuse mais également capable de faire resurgir le chaos…La nature quoi…
Elle avait aussi le don de prémonition.
Ce don, elle a transmis à sa fille Thémis.
Pas Thémis mon amie magique, mais la déesse de la justice.
C’est pour ça que tu es comme tu es Thémis ?
*
Après la peinture, dédiée à la réalisation d’un dessin pour Mamie, on décide de se défouler sur du rock’n’roll !
Les paroles de Pink Floyd, et de Bruce Springsteen résonnent avec l’actualité.
Je vais vous traduire un petit bout, parce que tout le monde ne speak pas English,
Pour le titre « Another Brick in the wall », il y a cette phrase : »Nous n’avons pas besoin d’éducation, nous n’avons pas besoin de contrôle de pensée… »
Je n’ai pas traduit les paroles à Marlée.
Mais ce morceau a eu l’air de l’inspirer .
Elle a dansé, secoué ses bouclettes en faisant du « air guitar », avec un manche à balai
« Maman, j’aimerais bien apprendre à jouer de la guitare ».
Pour le titre « Born to the USA « , il y a celle-ci « Tu finis comme un chien qui a été trop battu ».
Grâce à leur président hyper con-pétant plus de 5 000 personnes sont mortes pour l’instant aux Etats-Unis. Il a de la suite dans les idées celui- là.
En cash quatre fois le prix initial, les Américains ont racheté sur le tarmac des aéroports chinois, des masques destinés à la France.
C’est la loi du marché, le plus offrant sera servis en premier.
« Parce que c’est La Monnaie qui dirige le monde
C’est La Monnaie qui dirige la terre », comme disait Nèg Marrons…
Je me motive pour plier le linge sur « Eyes of Tiger ». Tous les jours, sans surprise, c’est le même combat. Un super combo de tâches ménagères. Elles vont m’avoir à l’usure. La connerie humaine aussi.
Je rêvais d’un autre monde…
Je rêve de pouvoir me demander comme The Clash si  » should I stay or should i go ».
Devrais-je rester ou partir ?
Je ne peux pas aller bien loin.
On sort avec les filles et Sisi, au banc d’en face, au soleil, histoire de fixer la vitamine D.
On garde évidemment nos distances de sécurité.
Dans ce coin là, on peut sortir sans attestation.
Il n’y a pas de passage, pas de police.
Juste un petit sentiment de libération.
On évacue toutes les tensions, en tapant dans un ballon rond.
Une parenthèse éphémère, ou toutes les chimères sont possibles.
Un monde où un bobo peut guérir en soufflant dessus.
Un monde où Mulan, Mérida de Rebelle, Elsa et Anna mettraient une bonne raclée à nos gouvernements corrompus.
Un monde où régneraient l’intelligence et la décence.
Un monde où le petit peuple, et les plus démunis ne seraient pas la dernière roue du carrosse.
Un monde où les carabines seraient neutralisées par la fée Carabosse.
Un monde où tu obtiens le silence général juste en disant chut !
Un monde où les rires des enfants prennent le pouvoir sur les grosses bêtises des adultes.
La parenthèse se ferme. Le temps autorisé s’est écoulé.
On retourne dans nos appartements avec vu sur les toits, les gouttières et les câbles électriques.
Je ne comprends vraiment pas les chats qui se baladent sur les rebords de balcons et sur les toitures . Il y a mieux comme point de vue.
Mais quand même, je voudrais bien être un chat…
Pour qu’on me gratte le dos, être câlinée, pour qu’on m’ouvre portes et baies vitrées, et aller où je veux à ma guise !
La bise, et gratouille dans le coup.
Miaouuu !

 

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