Chroniques Nîmoises

This Is Not A Love Song : Third Day Six Feet Under.

01 JUIN : TINALS . JOUR 3

Cœur lourd, vague à l’âme, elle-même en peine. C’est fini, je vis mon deuil annuel. Quelques jours seront nécessaires pour réussir à sortir la tête de l’eau. Aujourd’hui, c’est dimanche et le monde ne veut pas que je m’en sorte. Je n’ai plus de café, rien n’est ouvert, la ville se meurt désertée par des festivaliers qui se remettent ou par des familles qui s’enfuient à l’Espiguette et le pire, le pire, réside dans le fait que je ne puisse pas me consoler de ce déchirement avec Michel Drucker à cause de cet enfoiré de Roland Garros. Je suis tellement au bout du rouleau que j’hésite à vous narrer mes souvenirs de ce troisième et dernier jour de festival. J’emploie déjà des termes comme « souvenirs », j’suis au fond c’est bon ! Mais quand même, quand j’y repense …

L’après-midi a commencé dans le patio, j’étais venue pour la fraîcheur sans même savoir qu’il y avait un concert. Et puis j’ai vu l’indescriptible, un duo de chanteurs (effectivement, va suivre une description de l’indescriptible) vêtus d’un bonnet de bain, de cheveux aussi soyeux que ceux de Lou Doillon la veille et d’un tee-shirt jaune avec croco et palmiers qui n’ont trompé personne. Ainsi est arrivé Rocky Controlo à qui on ne peut reprocher l’absence d’audace. Ils décrochent donc la palme du premier groupe à reprendre une chanson de Marc Lavoine sur la scène d’un festival de rock indé ! A côté de moi, j’entends une paire de Dr. Martens / tee-shirt Hard Rock Café émettre un soupçonneux et sérieux « C’est inattendu comme style ». A peine le temps de rire face à cette phrase, je trottine jusqu’aux tentes en extérieur pour assister à la conférence sur la BD indépendante. Tanx et FabCaro parlent en tant que dessinateurs/illustrateurs face à Miquel Clemente de 6 Pieds Sous Terre, leur maison d’édition. On y évoque la place de l’éditeur, son lien avec l’auteur pendant la conception d’un livre, illustré qui plus est, la neutralité du genre derrière les noms d’artistes… Encore une fois le public est super participatif contrairement à moi qui dessèche contre un poteau, la paupière clignant intempestivement depuis une demi-heure, craignant l’hypoglycémie. Calmez votre tachycardie inquiète, j’ai mangé dix tranches de mortadelle le midi, tout va bien caloriquement parlant. Sur le chemin du retour, j’en profite pour piquer trois ou quatre ex-libris issus de livres édités par 6 Pieds Sous Terre tous plus beaux les uns que les autres.

J’avais jusqu’à présent réussi à résister mais j’ai péché. J’ai craqué et ce ne fut pas beau à voir. J’ai regretté de m’être contenue pendant les deux journées précédentes. Je me suis donc arrêté aux ateliers. PAF un badge ! PAF un bijou en céramique ! PAF une couronne de fleurs et une broderie! Le monstre était lâché, inarrêtable. J’ai même pédalé pour mixer un jus de fruits… Prenons du recul : ça fait dix ans que je ne suis pas montée sur un vélo et, là, j’enfourche le bordel devant 50 gamins pliés de rire devant ma galère ! Je me suis auto-terrifiée. Un Godzilla du TINALS ayant perdu tout sens des réalités.

Pour me remettre du choc de ma propre vision, je suis descendue vers la scène Mosquito. Il était 19H15 et Wednesday Campanella jouait. Bon ben ok. S’il ne devait rester qu’un unique concert de ce festival, pour moi ce serait celui-ci. Le groupe japonais et sa chanteuse, connue pour ses performances et son échange hyper fort avec le public, n’ont pas faire démentir les on-dit : nous sommes face à une artiste complète. Super-star dans son pays natal, KOM_I était, au moment où je suis arrivée, en train de valser avec un ballon gonflable de la taille de la scène. Soudain, je la vois disparaître dans le ballon. Un fait divers des années 90 où un gamin était décédé étouffé dans un château gonflable troué de Mac Do© me revient immédiatement en tête, je me dis qu’on assiste en direct à un drame absolu. Mais apparemment ça n’inquiète personne, pas même les deux vigiles qui se placent eux aussi sous le ballon. Les trois nouveaux compères descendent alors de scène, toujours accrochés à cette sorte de zeppelin, et avancent dans la foule. Je vois clairement ce tsunami en toile m’arriver dessus et je ne peux oublier la catastrophe du Mac Do©. Un (dix-huit) pas de côté et j’évite la vague ! Ils dépassent alors le public et laissent s’envoler le ballon se dégonfler sur le reste du festival. Alors que la foule se dit que ce final était fantastique, KOM_I revient, monte sur la structure de la régie son et, en souriant, attrape une feuille et la mange après avoir émis un mignon « I’m a koala ». Toujours accrochée à la structure, elle débute sa dernière chanson qui durera une dizaine de minutes. Déambulant en milieu de la foule, elle va jusqu’au plateau dédié aux P.M.R. pour danser avec un pot de fleurs. La chanson est chamanique, je suis à deux doigts de flipper que Wednesday Campanella déclenche mon accouchement (oui, rappel du détail qui n’en est pas un durant un festival caniculaire de trois jours : actuellement, je porte la vie sous mon nombril) (deuxième détail : pour les gens m’ayant croisée, c’était du jus d’ananas ou de la Tourtel© dans mon verre!). Le concert se termine sur une chanteuse au sol, accroupie, et un public qui applaudit pendant de longues minutes sans parler.

Sur le retour, je passe devant le van du tarot de l’amour, je zyeute par dessus l’épaule de la Madame Irma de la Happy Team toute de doré vêtue. Le couple sur le fauteuil d’en face vient de tirer les cartes : Baskia, Dawson, Booba et Britney dans sa période boule à Z. Bizarrement, j’ai l’impression qu’un des deux gars prend réellement très mal le résultat du tirage… Il fusille son mec du regard. J’essaye alors de comprendre la carte coupable de cette haine qui monte en lui. Pas de doute, c’est Dawson. Je le vois, il est à deux doigts de choper la carte et de la déchirer ! Je décampe avant qu’une engueulade conjugale voit auditivement le jour.

Dans le patio, Mick Strauss. Comme d’habitude j’ai envie de dire. Alors, l’orga de TINALS nous parlait d’un type secret, cherchant l’anonymat, invisible sur internet, … Je m’imaginais depuis trois semaines que le mec allait arriver habillé et peint en jaune fluo pour éviter qu’on ne le remarque même dans le couloir de Paloma. Au final, je l’ai plus vu que mon propre mec. Je l’ai plus vu que mon propre reflet alors que le This Is Not A Love Song arrive sur le podium des spots où faire des selfies ! Trois jours de festival, trois jours de Mick Strauss dans le patio. Mais la formule marche ! Grâce à la répétition de ses apparitions, le public devenu fan connaît ses chansons par cœur alors qu’elles sont introuvables sur le net.

Le temps de retrouver des potes perdus de vue depuis 10 ans, d’essayer de leur faire comprendre que, non, je n’ai pas pris 35 ans dans la gueule, que là c’est exceptionnel, que lundi ça ira mieux. Ils me regardent en souriant avec la même pitié qu’avait mon père quand il a appris que j’avais commencé à fumer à 17 ans. Je fuis me réfugier contre un sandwich à La Pause d’Auguste. Il m’aura fallu un peu de temps pour digérer. Pas le sandwich qui est passé comme une lettre à la poste, non, la blague pas drôle de deux lourdingues qui m’ont dit que j’avais trop bouffé en matant mon ventre. Dans ma tête, qui ne connaît pas la demi-mesure, j’ai cru qu’ils m’avaient pourri la soirée les cons. Heureusement, c’était sans compter sur Cola Boyy et Prettiest Eyes. Les deux derniers concerts de ma septième édition du TINALS. Fantastiques, complètement fous, déchaînés, liés au public, thérapeutiques dans un sens si on pousse un peu ! Un feu d’artifice pour les oreilles et le moral. Car oui, la mélancolie est là mais pansée par ces réconforts musicaux.

Alors on remonte la pente, un an c’est pas si long. Tout le monde arrive à surmonter l’absence du Tour de France le reste de l’année, alors on va faire pareil avec TINALS ! Je ne dis pas que j’y arriverai tout le temps, qu’il n’y aura pas des bas, que l’absence sera facile… Sûrement que début septembre j’aurai besoin de me refaire la discographie complète de Courtney Barnett (avant que le seul son que j’entende soit un pleur continu de nouveau-né pendant des mois), qu’à Noël j’offrirai à mes copines « Mes bien chères sœurs » de Chloé Delaume et à mes copains des bouquins édités chez 6 Pieds Sous Terre, que pour mon anniversaire en février je passerai voir un concert dans le Club … Et puis tu commenceras à refaire parler de toi, je prendrai mes places à l’aveugle, j’entendrai les premiers noms de ceux qui viendront fouler tes scènes, je m’organiserai pour être toute à toi et, enfin, on se retrouvera.

À dans un an pour la huitième, ne m’oublie pas quand même !

 

Article : Channel

Photos : Gilles Guilbert et Ansfati M’Madi

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